Épisode 30
- JF
- 20 nov.
- 3 min de lecture

Si je n’ai aucun souvenir de ma communion privée par contre je me souviens très bien de ma communion solennelle.
Je crois me rappeler que les quelques journées de préparation et la cérémonie elle-même avaient lieu dans l’église du Sacré-Cœur, située à moins d’un kilomètre de la maison et dans laquelle je pouvais me rendre à pied.
J’ai beau chercher à retrouver sur internet la présence de cette église, mais tout a tellement changé que je ne suis plus sûr de rien.
J’ai bien noté l’existence d’une « cure du Sacré-Cœur » jouxtant des bâtiments d’une paroisse dite de « Notre Dame en Chalonnais » et qui semble correspondre à l’emplacement que je crois être le bon, mais je ne suis pas certain de ne pas me tromper.
Bref, la journée elle-même reste gravée dans ma mémoire.
A cette époque, la tenue des communiants n’avait rien à voir avec celle utilisée quelques années plus tard, une aube blanche que mon frère Jean-Pierre allait revêtir pour la même occasion trois ou quatre ans après.
Élégamment vêtu d’une veste et d’un pantalon anthracite, tous deux taillés sur mesure, chemise, pochette et gants blancs ainsi qu’une cravate grise, soigneusement nouée par Maman, j’étais superbe.
Mon bras gauche était orné d’un brassard de soie blanche, avec un gros nœud papillon au sommet la partie basse terminée par des franges et dentelle.
Nous paradions, mes amis pareillement accoutrés et moi-même, sous les yeux attendris des familles rassemblées ce jour-là.
Mes parrain et marraine ainsi que des oncles et tantes réunis autour de mes parents, la fête allait durer toute la journée.
Messe le matin, vêpres l’après-midi, c’était avant tout une journée qui signait, avec la cérémonie de « confirmation » quelque temps après, notre entrée dans la communauté adulte des chrétiens catholiques, singulièrement appauvrie de nos jours.
Un excellent repas fut servi à midi, au terme duquel je reçus les traditionnels cadeaux réservés à cette occasion.
Un « missel vespéral romain » avec sa couverture de cuir fauve, qui m’a longtemps accompagné, abondamment garni au fil des pages et des ans, d’images de communion, de naissances et parfois de décès de la famille et des amis qui ont jalonné ma vie.
Un chapelet aux grains d’ivoire, offert par ma marraine, que j’ai lui aussi égaré mais qui réapparaîtra peut-être un jour, dans un tiroir resté fermé depuis longtemps, ou une boite oubliée dans un coin. Qui sait ?
Une montre, la première de ma courte existence, avec un « trotteuse » qui marquait les secondes et une petite fenêtre qui égrenait quotidiennement les dates et qu’il fallait surveiller, chaque fin de mois pour tenir compte des mois de trente ou trente-et-un jours, sans compter cet original mois de février, ses vingt-huit jours devenant vingt-neuf tous les quatre ans.
C’est à cette époque que j’ai découvert l’existence des années bissextiles.
C’est également à cette occasion que j’ai appris de Papa la méthode permettant de distinguer les mois de trente ou trente-et-un jours en comptant les bosses et les creux sur mon poing fermé.
Enfin Tonton, mon parrain, toujours prêt à faciliter mon apprentissage scolaire, m’offrit dans un superbe écrin de carton bouilli, un stylo qui accompagna mes études durant des années.
Il était magnifique avec sa plume en or et son système de remplissage à piston que j’actionnais chaque fois que nécessaire pour gonfler d’encre le réservoir en caoutchouc.
Que de fois j’ai puisé dans ces astucieuses bouteilles d’encre « Waterman » ce liquide bleu-marine, dont je portais souvent la trace sur les doigts et grâce auquel j’ai aligné tant de lignes sur des milliers de pages.
J’ai usé depuis de nombreux stylos mais jamais aucun ne m’a apporté autant de plaisir à écrire que celui-là.
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